Les débats qui entourent de nos jours cette notion sont souvent vifs et passionnés. Commettre un acte de désobéissance engage toujours la responsabilité personnelle de celui qui le fait. Le second droit qui suspend légalement l’obligation de se conduire conformément à la loi est la clause de conscience – c’est-à-dire la possibilité de refuser d’accomplir un acte professionnel au motif qu’il est contraire aux convictions éthiques ou religieuses de la personne qui doit le pratiquer. L’histoire ne s’arrête cependant pas là puisque, en mai 2014, la cour d’appel de Colmar, tout en confirmant la condamnation pour violation de domicile, prononce la relaxe des faucheurs volontaires du chef de destruction de bien public en estimant « que l’arrêté ministériel autorisant l’INRA à tester ces organismes génétiquement modifiés au milieu du vignoble alsacien était “illégal” en raison d’“une erreur manifeste d’appréciation des risques inhérents” à l’expérience, réalisée dans un environnement non confiné » . La requalification de la désobéissance civile en rébellion appartient à la logique du droit. Ce fut le cas des enseignants qui, en France, ont refusé d’appliquer les nouveaux programmes de l’école primaire. C'est sans doute le trait le plus important de la désobéissance civile puisque c'est lui qui lui donne une certaine légitimité. nécessaire]. Une quatrième possibilité de se soustraire légalement à l’obligation est le droit de retrait. Ce fût le cas par exemple lorsque des enseignants ont publiquement annoncé qu’ils ne respecteraient pas les instructions concernant les heures de rattrapage qu’ils devaient assurer pour pallier la suppression de postes d’enseignants spécialisés dans l’aide aux élèves en difficulté. Ainsi, des écrivains et cinéastes français, dans leur texte appelant à la désobéissance civile en 1997 contre un projet de loi de Jean-Louis Debré, qui obligeait notamment toute personne hébergeant un étranger en visite privée en France à déclarer à la mairie son départ, faisaient référence aux libertés publiques et au respect de la personne humaine. Il ne se soumettra pas, par peur d'une punition, à un ordre émis par la colère. Autrement dit, d’agir politiquement en se laissant guider par ce que l’on peut nommer leur conception ordinaire du politique et de la démocratie. Dans le cadre d’un État démocratique légitime, le but d’un mouvement de désobéissance civile n’est pas de contourner les institutions. Là où le simple acte de distribuer de l’information peut gêner un régime ou mettre au jour un délit, nous reconnaissons cet acte comme un droit, et même un devoir. Le but : dérober des chaises dans des agences bancaires afin de dénoncer l'évasion fiscale[7]. Et il en a été de même avec l’avortement, l’euthanasie, le mariage homosexuel ou la gestation pour autrui – là où ces droits ont été obtenus. ; (2) soit des personnes sans structures ou relais organisationnels avérés qui décident d’enfreindre une loi portant atteinte, à leur yeux, à une liberté individuelle dans le but de dénoncer publiquement cet état de fait (euthanasie, procréation artificielle, fichage ADN ou injonction faite aux journalistes de livrer leurs sources, refus de présenter son billet dans le train, occupations d’école, etc.) Elle a été utilisée à plusieurs reprises par les paysans du Larzac dans leur lutte contre l'extension du camp militaire entre 1971 et 1981. La désobéissance civile prend alors une forme un peu inédite : boycott des opérations d’enregistrement (comme pour la « Base élèves ») ; refus de produire ou de communiquer des données indispensables à l’exécution des procédures légales ou administratives (blocage des saisies obligatoires pour alimenter les multiples systèmes d’information) ; refus de remplir des questionnaires ou des tableaux de bord administratifs ; boycott des évaluations. La désobéissance civile: Approches politique et juridique (Espaces politiques t. 1114) (French Edition) - Kindle edition by Hiez, David, Villalba, Bruno, Vallançon, François, Mellon, Christian, Collectif, Hiez, David, Villalba, Bruno. Jacques Cresta dévoile (en partie) son … Peu de gens contestent qu'il est légitime de s'opposer à un gouvernement non démocratique par la désobéissance civile, puisqu'il ne s'agit pas d'un État de droit. La désobéissance civile peut donc s'analyser comme un « délit politique » et dès lors, le désobéissant civil bénéficiera du régime de protection qui peut être mis en place pour ce type de délit. Cependant, en dehors des anarchistes purs et durs, le « résistant » choisit plutôt de ne réduire sa contribution qu'en proportion des actions du gouvernement qu'il désapprouve. C’est que l’on ne voit pas bien pourquoi l’expression d’un désaccord devrait prendre les allures d’un refus de se plier à la règle commune dans un régime où les libertés individuelles (de vote, d’opinion, de manifestation, de grève, de conscience et d’association, d’orientation sexuelle) sont garanties ; où des mécanismes de « dialogue social » ont été institués (dans le travail parlementaire, le paritarisme ou les négociations collectives) ; et où la défense des droits fondamentaux est une réalité juridique. La désobéissance civile serait donc un outil contre la « dictature de la majorité » qui sévit en démocratie selon Tocqueville, un illustre contemporain de Thoreau. C'est au cours du deuxième qu'il va découvrir le traité de désobéissance civile de Henry David Thoreau. L'historien relève un passage particulièrement intéressant : « après l'exposé de la mission qui était confiée au bataillon, à savoir l'exécution par les hommes du bataillon des femmes, enfants et vieillards juifs d'un hameau polonais comptant 1 800 juifs, le commandant du bataillon écœuré par l'ordre qui lui avait été donné propose à ceux qui ne s'en sentent pas la force de ne pas participer à la mission ; seulement 12 hommes sur les 500 du bataillon refusèrent d'accomplir la mission ». Le débat qui s'est instauré autour de la désobéissance civile peut être un beau débat théorique à coups de grands mots et de grands principes. De prime abord, la démocratie est plutôt le lieu de la conversation et de la négociation. Les actes de désobéissance civile posent un très délicat problème à la justice. L'article 22 du décret n° 85-295 du 1er mars 1985 (pris pour l'application de la loi précitée) a prévu l'obligation de tenue de comptes et de désignation d'un commissaire aux comptes pour les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique. On peut distinguer en particulier celles essentiellement passives, celles plus offensives et, parmi celles-ci, celles comportant la destruction de biens matériels (arrachage de plants de maïs OGM par exemple). La désobéissance civile est le refus assumé et public de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir jugé inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat pacifique. Savoir où se situe cette responsabilité est une question juridique cruciale, dont Sophie Turenne précise l’enjeu en rappelant que, en France : « Une jurisprudence constante déduit du Code pénal un devoir d’“obéissance passive”, d’après lequel le subordonné doit toujours obéir aux ordres de ses supérieurs, sans se poser de question sur leur éventuelle illégalité. Un appel à la réforme. Au XXe siècle, 12 000 jeunes objecteurs de conscience suisses ont été condamnés pour refus de servir l'armée, avant que le service civil ne soit créé en 1996[20],[21]. Ces dernières obéissent à des qualifications juridiques particulières (destruction en réunion dans le cas français). Les deux thèses s'affrontaient au sujet de la valeur juridique de ce préambule et des textes auxquels il renvoie. Les actions de cette association ont conduit les deux présidents — Tiphaine Lagarde et Ceylan Cirik — devant les tribunaux[14]. ; et celle de l’extension des droits politiques et sociaux des citoyens. Les actes de désobéissance civile posent un très délicat problème à la justice. Ce mouvement d'indépendance a permis la théorisation de la désobéissance civile qui fut mise en place par Henry David Thoreau dans son essai « Resistance to Civil Government » publié en 1849 à la suite de son refus de payer la part de l'impôt destinée à financer la guerre contre le Mexique en vue de l'annexion du Texas, fait pour lequel Thoreau fut contraint à passer une nuit en prison. Le domaine pour lequel la clause de conscience s’applique est circonscrit à certaines catégories d’actes médicaux : avortement (article L. 2212-8 du Code de la santé publique) et stérilisation à visée contraceptive (article L. 2123-1). Et on sait que la réunion de ces quatre éléments n’est pas si facile à établir. Ce principe stipule que « l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement, à un coût économiquement acceptable ». Il faut signaler que, pour rendre l’interruption volontaire de grossesse légitime et lever les oppositions, la loi Veil a introduit une clause originale : la situation de détresse (article L. 2212-1 du Code de la santé publique) ; clause qui a été supprimée dans la « Loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » votée le 4 août 2014, afin de faire de l’avortement un droit inconditionnellement laissé à la décision des femmes. Touchant cette question, il est intéressant de rappeler l'expérience réalisée par Stanley Milgram où le sujet de l'expérience consiste à mesurer la proportion des individus capables de démarrer un tel acte de désobéissance malgré la pression sociale ou administrative. Une autre norme du droit français interprétée a contrario (article 433-6 du code pénal) accorde une certaine protection aux personnes faisant des actes de rébellion à l'égard de fonctionnaires publics qui agiraient sans titre (par exemple dans le cas d'une perquisition sans autorisation du Juge des Libertés et de la Détention). De son côté, la religion chrétienne au Moyen Âge distinguait, sur la base de la théorie des deux épées formulée au Ve siècle par le pape Gélase, la sphère civile et la sphère religieuse. De nombreuses personnalités défendent la légitimité de l'avortement malgré son caractère illégal lors d'un procès très médiatisé. Pour la désobéissance radicale, nous ne sommes pas en démocratie — le gou- vernement du peuple par le peuple pour le peuple — mais dans une sorte d’oli- garchie instaurée et confortée par l’élection et un système socio-économique La théorie classique de la désobéissance civile suppose donc que des lois puissent être réputées injustes parce qu’elles violent des droits fondamentaux de la personne humaine constitutifs d’un droit naturel surplombant le droit positif et dont l’autorité trouve sa source, sinon dans l’éternité de la loi divine, du moins dans l’universalité de la loi de la raison. Au-delà du juge, la désobéissance civile adresse au législateur un appel à la réforme. En un mot, bien que l’on observe régulièrement que la grandeur et le courage de celui qui se lève et dit « non » pour faire valoir son opinion contre l’avis de ses contemporains sont loués, et parfois jalousés (lorsque la revendication exprimée est juste et légitime bien sûr), on constate que la résistance à l’oppression en tant que droit trouve difficilement place dans l’exercice courant de la justice. Contrairement à certaines idées reçues, il ne s’agit pas d’un mouvement révolutionnaire ou subversif, mais d’une pratique presque aussi ancienne que la démocratie elle-même et qui fait partie intégrante des théories modernes de la démocratie libérale [1]. Oui, car l'Etat de droit repose sur deux piliers : d'abord, le fait que la loi s'applique à tous et que chacun doit la respecter.